Assurance : « rendre les échanges avec les clients plus fluides »

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Entretien avec Émile Fyon, co-fondateur et CEO de Penbox, l’insurtech qui permet de simplifier la collecte d’informations et de documents d’assurance, pour améliorer les interactions avec ses clients.

Qui êtes-vous ?

Je suis ingénieur de gestion de formation. J’ai commencé comme consultant chez Capgemini, puis j’ai travaillé pour une start-up technologique et ensuite, j’ai rejoint Axa pendant sept ans, où j’ai fini Directeur responsable de la Digitalisation. J’ai toujours eu une âme d’entrepreneur. J’ai créé ma boîte lorsque j’étais en études, où je faisais des sites Web et apportais des services digitaux, notamment. J’ai toujours eu envie de créer, pour avoir un impact sur le monde ; je suis passionné par les technologies et l’excellence opérationnelle. Ce qui est bien, c’est que ces deux sujets vont bien ensemble !

Quelles sont vos passions / vos valeurs personnelles ?

En tant qu’entrepreneur, je trouve que la gestion de l’humain est quelque chose de fascinant. Réussir à créer un environnement où les gens ont personnellement envie de se dépasser et de grandir, tout en gardant un environnement de travail agréable et stimulant. Pouvoir identifier les personnes qui peuvent grandir mais aussi leur donner les challenges – pas trop grands, pas trop petits – pour qu’ils puissent évoluer et ce, régulièrement.

Quelle est la genèse de la création de Penbox ?

Lorsque j’étais Directeur responsable de la Digitalisation à AXA Belgique, j’ai passé une semaine dans les opérations. Comme le CEO de Disney qui travaillerait à la caisse… L’objectif était de comprendre les vraies problématiques terrain et de les voir de mes propres yeux. Et là, j’ai constaté que la plus grosse frustration que les employés ont – mêmes s’ils ne sont pas toujours capables de l’identifier et la verbaliser – c’est l’inefficience des échanges avec les clients. Chaque dossier demande plusieurs échanges d’emails, voire de courriers, qui sont totalement inefficaces, pour le collaborateur mais aussi pour le client.

Nous avons alors eu l’idée – le rêve – avec mon collègue de l’époque et maintenant associé, de créer une solution que chaque collaborateur peut utiliser quotidiennement, quelle que soit la complexité du processus.

Quels sont les périmètres serviciels de votre insurtech et son apport dans ce périmètre ?  

Nous nous positionnons dans les échanges entre l’assureur ou le courtier avec le client. Nous permettons de structurer, faciliter et sécuriser les échanges, avec trois propositions de valeurs fortes :

  • La première est l’amélioration de l’expérience client puisque nous rendons l’expérience digitale, self-service et omnichannel.
  • La deuxième est l’augmentation de la productivité du collaborateur. La productivité en assurance est un sujet économique évidemment, mais c’est aussi un sujet de gestion de talents, puisque les experts se font de plus en plus rares et sont difficiles à trouver et garder.
  • Enfin, la sécurisation des échanges. Que ce soit les législations en place tels que le RGPD ou simplement les problèmes de sécurisation des boîtes emails, les échanges de données confidentielles ou médicales par emails sont à proscrire en assurance. Nous offrons une solution alternative pour les acteurs de l’assurance, qui leur permet alors d’être en conformité.

Quels constats actuels faites-vous de l’assurance ?

En général, je vois deux dynamiques fortes : une première est la consolidation des acteurs de la distribution, qui continue de s’accélérer. Nous passons de sociétés qui sont des sociétés familiales et qui avaient une croissance faible, à des acteurs avec des plans de croissance agressifs et une organisation qui est beaucoup plus professionnelle.

La deuxième est basée sur le régulatoire : les procédures se complexifient, qu’il s’agisse de souscrire des nouveaux contrats, obtenir des nouveaux clients ou même parfois régler des sinistres. Sans compter les exercices de remédiations qu’il faut faire sur une partie ou l’entièreté du portefeuille. Les acteurs qui n’arrivent pas à digitaliser efficacement ces processus voient leur productivité grandement réduite ou leur risque grandement accru.

Sur notre périmètre spécifiquement, nous voyons que le full-digital ne fonctionne pas ou peu. Premièrement parce que les produits restent complexes, donc nous avons bien souvent besoin de ce contact client. Ensuite parce qu’il y a beaucoup de risques de sélection adverse sur les clients full-digital. Les acteurs qui arrivent à faire les plus belles croissances tout en gardant leur lossratio sous contrôle sont ceux qui arrivent à avoir une approche phygitale : digitale quand nous pouvons, physique quand il faut.

Quelle est votre vision de l’évolution du secteur ?

La consolidation du marché va continuer à s’accélérer. Parce que cela est nécessaire par rapport aux besoins d’investissement, notamment en digital mais aussi pour répondre aux besoins du régulateur. Également, les fonds de private equity s’intéressent de plus en plus au marché de l’assurance et sont très attirés par le modèle de primes récurrentes – qui peut être comparé d’une certaine manière au software.

Nous allons avoir aussi beaucoup plus de spécialisation, que ce soit sur la mise en place des produits sur le marché par les assureurs ou souscripteurs / courtiers grossistes, mais aussi par les acteurs de la distribution. Cette spécialisation permet d’atteindre une très grosse vélocité commerciale sur le marché mais également une productivité très compétitive, sur les forces commerciales comme sur les équipes de gestion.

Quelles sont vos convictions ?

Nous parlons souvent de disruption du modèle de l’assurance par des acteurs type GAFAM. Les marchés de l’assurance ne sont pas faciles à disrupter, car cela demande de l’expertise avec des produits qui prennent des années avant de comprendre s’ils sont rentables. Nous voyons bien la problématique avec des acteurs comme Lemonade, qui ont eu un loss-ratio de près de 100%. Simplifier les produits d’assurance, selon moi, n’est pas la clé car cela induit trop de sélection adverse. Les acteurs qui vont gagner dans les années à venir ne sont pas les acteurs qui rendront les produits d’assurance plus simples, mais qui rendront les échanges avec leurs clients plus fluides.

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